bleu du ciel (isaac)

Ça avait été comme une évidence. La première fois que tu l’avais vu. Rencontré. Tu l’avais tout de suite su. Que ce serait lui. Pas un autre. Oui, alors, t’avais osé. Osé comme jamais avant. Pour l’aborder. Lui faire comprendre ce que tu voulais. Ce que tu souhaitais. Ça avait été un peu bizarre en y repensant. Mais, t’en était tellement content. Maintenant. Que tu t’en fichais bien de cette rencontre. Passé. Maintenant, il était là, avec toi. Et, ça faisait boum boum dans ta poitrine. Si fort. Ce sentiment. Si beau. Ce sentiment.

Sourire sur le coin de tes lèvres, tu balançais tranquillement tes pieds dans le vide, assis là, dans le jardin. La balançoire te portant calmement. Lui, était un peu plus loin. Lui était juste là, en face de toi. Dans l’herbe. Si beau. Un rire et tu t’envoles. Sautes pour le rejoindre rapidement, t’écrouler à ses côtés. Sourire mutin à tes lèvres. « Dit ? Je peux te dessiner ? » Oh oui, que tu mourrais d’envie. De le croquer. Lui. Lui où tu avais tout de suite su. Qu’il avait ce petit quelque en plus. Qu’il avait cette chose qui ne te ferait pas lâcher. Jamais. Tu tenais à lui. Tu voulais le kidnapper parfois, dans la langueur d’une étreinte. Rire. Et tu pousses son épaule. Parce que tu l’aimes Isaac. À ta façon. D’une drôle de façon. Mais, tu penses que lui aussi. Il a un petit quelque chose même si tu sais. Que c’est que les filles qu’il regarde. Entre vous. Y a un petit quelque chose de spécial. Oué.

C’est pour ça que ta main, elle s’attarde un peu trop sur son épaule. Que ta joue la frôle et que tes cheveux se glissent dans son cou. T’es si bien avec Isaac. Tu penses qu’il est un peu ta muse. Celui qui t’inspire tant. Tu sais plus. Combien de fois tu l’as dessiné en secret avant de lui demander. Enfin. Avant de l’aborder. Enfin. Artiste lui aussi. Tes yeux viennent capter le bleu du ciel et tu te dis qu’ici se serait parfait. Pour le dessiner.

Je ne m'étais pas attendu à rencontrer quelqu'un d'aussi intéressant que Cornelio, tout simplement parce que c'était un artiste, parce qu'il n'était pas pareil, différent. Gentil, attentionné. Je sais qu'il m'aime beaucoup, moi aussi je l'aime, à ma manière. Je ne l'aime pas comme Julia, Baya, ou... ou n'importe qui. Il est spécial, dans son genre. Il a un petit truc, quelque chose de caché au fond de son âme. J'aimerais composer pour lui. Ou alors, comme lui, le dessiner, car c'est un plaisir de croquer, comme il dit, quelqu'un de beau. Je le trouve beau, et c'est vrai, c'est la pure vérité. Quand il me demande s'il peut me dessiner, je ne peux pas refuser, car pour moi, c'est un honneur d'être dessiné par Cornelio. Mais j'ai envie de m'amuser aujourd'hui, de faire mon méchant, d'être un peu sadique. Je ne lui ais jamais fait le coup, il serait temps, en plus. Non, je refuse. Je ne veux pas que tu me dessines. Je fais ma tête de grognon, avec les sourcils froncés et un regard noir. Je sais que je ne suis pas très crédible, mais ça a l'air de faire son effet. D'ailleurs, je ne sais même pas pourquoi tu me demandes ça, c'est honteux. Tu devrais être puni. J'ai du mal à retenir mon rire, et je dois me faire violence pour ne pas lui sourire. J'ai envie de voir sa petite mine se décomposer, tintée de tristesse. Parce qu'après, je pourrais le consoler. J'aime consoler. Non, j'aime le consoler.

T’as hâte. De pouvoir le croquer. Glisser le crayon ou le fusain sur le papier. Pour y laisser s’égarer ses courbes. Si belles. Mais, tu t’attendais certainement pas à ça. Ça. Et, y a ta main qui quitte son épaule. Ton sourire qui s’efface si vite. Tristesse. Tu ne vois pas. Qu’il fait exprès. Tu ne vois pas, qu’il se retient de rigoler. Parce que ça t’as fait un coup au cœur. Un coup à l’âme. Et y a ton visage qui l’exprime. Si fort. Fort. Les traits si tristes. Tristes. Parce que tu aimes tellement. Le dessiner. Tellement.

Puis, ton regard s’égare, un peu sur l’herbe. Sur son visage. Et tu vois. Vois. Et, la tristesse s’envole, doucement. Et, la colère s’avance, doucement. Quoi ?! Tes lèvres se crispent. Ton corps se tend et tu commences à le regarder un peu méchamment. Enfin, aussi méchamment que toi tu sais faire. C’est-à-dire avec cette mine boudeuse qui te rend si beau. Et tu tapes. Là, sur son épaule. Et tu cris. « Hey ! Mais tu te moques ! » Et t’as le cœur qui se gonfle à nouveau. Nouveau. Parce que c’est Isaac. Parce que tu vois bien qu’il a fait exprès. Et ça te rassures. T’amuses et t’as envie de te venger. Vengeance.

Alors, soudainement. Pour pas qu’il s’y attende, tu lui sautes dessus, tu cris un cri de guerre et, tes mains s’égarent rapidement là, sur son corps. Les chatouilles commençant à se glisser, vicieuses, le long de son corps, ses côtes. Et tu ris, et tu cris. « Tu te moques ! Tu te moques ! » Et ton sourire se fait à nouveau voir alors que tu prends malin plaisir à torturer les corps sous toi. De la plus belle des façons. Vengeance.

J'aime triturer les gens dans le genre de Cornelio. Ça me fait rire, et... ou pleurer. « Hey ! Mais tu te moques ! » Avec cette mine si triste, ça me fait un serrement au cœur. De le voir comme ça, qui se décompose devant moi. Parce que je m'amuse avec ce petit chat. Il me tape sur l'épaule, et je lui souris. Et c'est là qu'il me saute dessus. Crétin ! Il me chatouille, il rit, il crie. Arrête ça ! Il continue de hurler que je me moque de lui, et moi aussi, je commence à éclater de rire. Comme un enfant. MAIS ! ARRÊTE DE ME CHATOUILLER ! Je crie, je le pousse gentiment, et je me relève. Puis je le regarde. Okay. Tu me dessines si t'arrives à me rattraper. Je lui tire la langue et je me mets à courir, de plus en plus vite. Je me retourne, mais je ne le vois pas. Je ralentis, mais je me dis que ça peut être une ruse de sa part. Une simple ruse pour m'attraper ensuite. Je me méfie de Cornelio, et de ses stratégies un peu... un peu originales. Voilà. Je me retourne et je continue de courir, pour voir s'il me suivra ou s'il restera là. Pour voir, aussi, si d'un côté, je tiens pour lui. Si je tiens à lui, aussi.

Et tu ris. Ris. Y a la douleur qui s’est envolée en même temps que la compréhension. Alors, tu ris en même temps qu’Isaac, en même temps que tes mains le chatouille. Parce qu’il est bête Isaac. Parce qu’il t’as fait un peu de peine. Mais, c’est pas grave. Plus maintenant. Parce que c’était une blague. Parce que c’était taquin. Alors, tu en profites. Tu ne t’arrêtes pas malgré les protestations. Jusqu’à ce qu’il arrive à t’échapper. Jusqu’à ce que tu grognes quand il se retrouve debout, loin de tes doigts, tes armes. « Mais ! »

Et tu le vois s’enfuir. Courir. Tu restes là, quelques instants. Surpris. Avant de te redresser. « Quoi ?!! » Que tu hurles longuement alors que tu t’élances à ton tour. Quoi. Il est taquin, aujourd’hui Isaac, tu trouves. Un rire qui gonfle ta poitrine et tu essaies de l’attraper. Attraper. Comment ? Oui, comment t’y prendre pour l’avoir. Le surprendre ? Un détour. Pour faire croire que tu es encore loin. Un détour avant que tes jambes se précipitent. Aussi vite qu’elles peuvent. Aussi vite que ton cœur qui bat si fort. Tu sautes, t’élances et tes bras attrapes sa taille. Et ton corps le heurte violemment dans un bruit sourd. La chute. Inévitable.

Oui, tu chutes en l’emmenant avec toi. « Attrapé » que tu souffles quand même avant de sentir le sol assez violemment, vos corps s’emmêlant ensemble. Outch. Tu y es allé un peu fort. Peut-être. Un rire gonfle ta poitrine. Mon Dieu. Qu’est-ce qu’il pouvait te faire faire. Corps emmêlés, t'as ton visage dans son cou. Tes bras toujours enserrés autour de lui. Tu ne veux plus. Lâcher. Le souffle haché d’avoir couru. Le cœur battant violemment d’avoir couru. T’es essoufflé. « Je te tiens. »

Juste une pensée me surgit lorsque Cornelio surgit et me rentre dedans. M'échapper encore une fois. Puis une autre. Ça fait deux. Bravo, Isaac. Ma seconde pensée : coude écorché. T'es un fou, toua. Il m'a attrapé. Cornelio. A bobo là. Je lui montre mon coude, alors qu'on est encore couché sur le bitume, dans une rue vide de toute existence. Après, je dois aller chez Julia, si elle me voit comme ça, j'aurais l'air de quoi ? J'ai le temps d'aller chez moi avant ce soir, on est encore le matin. T'es vraiment un crétin. Je m'extirpe de son étreinte, et je me relève. J'enlève les petits cailloux qui se sont collés à mes vêtements, relace mon lacet, et je m'assois. Je le regarde, avec ma mine boudeuse. Mais c'est plus fort que moi, j'éclate de rire, littéralement. Je le vois, essoufflé. Si je recours là tout de suite, tu me poursuivras ? J'ai envie qu'il réponde non, comme ça je le ferais et il serait obligé de me suivre. Sauf que je ne le fais pas, parce que moi aussi, j'en peux plus. On dirait une mamie, mais t'es crétin. Une mamie qui est encore en pleine jeunesse. J'en peux plus, je ris, je ris, c'est la première fois depuis longtemps que je n'étais pas tombé sur le goudron encore froid de la nuit. Je tombe toujours dans l'herbe, c'est plus moelleux, et ça fait moins mal, de toute manière, je m'arrange pour ne plus jamais faire la course avec Cornelio, parce qu'il est fou. Okay, on retourne où on était, et tu me dessines. J'en peux plus, t'es vraiment... Je lui tends la main pour l'aider à se relever, et je continue de rire.

Tu fais un peu la moue. Parce que tu lui as fait mal. Mais, c’est un peu pas grave. Parce que t’as réussi. A l’attraper. Et, ça te fait sourire. Malgré les douleurs que tu peux ressentir toi aussi. Le sol, c’est dur. Tu souris. Lui attrape la main. « Désolé. » Mais, c’est lui qui a commencé, pas toi. Lui qui voulait jouer. Oui, lui. Tu serres la main, fort et, tu commences à marcher. Pour retourner là-bas, sur l’herbe. Main chaude contre la tienne. T’as pas vraiment envie, de la lâcher.

Un pas, puis un autre et tu luis souris. Si content d’être son ami. Ami. Isaac est si spécial. Spécial. « Je te dessines comment ? » Tu poses la question, mais, tu n’attends pas vraiment de réponse. Non. C’est un peu pour toi-même. Pour savoir comment il va t’inspirer le plus. Plus. Là, alanguis sur l’herbe ? Là, assis sur la balançoire ? Oui. Comment ? Parce qu’en fait, Isaac, il était toujours beau. Toujours. Mais, y a parfois ces instants. Un peu ailleurs. Un peu particuliers. Où là, il n’était pas seulement beau. Où là, tu pouvais arrêter de respirer, arrêter de vivre rien qu’en le regardant. Ta main se serre un peu plus contre la sienne. Isaac…